La faute et les comportements fautifs

La faute

"Toute faute commise par le fonctionnaire dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions l’expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale. » (Loi 83-634 du 13/07/1983 - art 29)

Contrairement à l’infraction pénale qui est définie par la loi, il n'existe pas de définition de la faute disciplinare. Il revient donc à l’autorité territoriale qui entend sanctionner l’agent de qualifier le manquement au regard des obligations professionnelles prévues par la loi ou la jurisprudence et de prouver l’existence de la faute. Elle se fondera sur l’existence de faits matériels et précis, sur le manquement à une ou plusieurs des obligations professionnelles ou déontologiques, sur la volonté d’enfreindre une obligation professionnelle et la qualification pénale de la faute (crime ou délit)…

La faute est professionnelle quand l’agent viole ses obligations ou la déontologie professionnelle prévues par les textes statutaires (loi n° 83-634 et statuts particuliers) applicables aux agents de la Fonction Publique Territoriale et par la jurisprudence. La faute est pénale lorsque l’agent, comme tout citoyen, commet une infraction (violences, harcèlement, violation du secret professionnel, vol, corruption, concussion, prise illégale d’intérêts, ...).


Attention ! Les faits peuvent euvent également être commis par l'agent dans sa vie privée. Une faute étrangère au service peut donner lieu à une procédure disciplinaire. Ainsi, sont fautifs les faits commis par l’agent dans sa vie privée lorsqu’ils portent atteinte à la réputation de l’administration, jettent le discrédit sur la fonction exercée ou apparaissent incompatibles avec les fonctions, l’honneur professionnel ou la qualité de fonctionnaire.

 

Les comportements fautifs

Le manquement à l'obligation de servir

L’agent doit respecter les contraintes qui résultent de son poste (durée hebdomadaire, horaires, consignes de sécurité, obligation de résidence le cas échéant...).
Il en résulte qu’un absentéisme répété, des retards ou des départs précoces et répétés, des absences injustifiées... pourront être sanctionnés au titre du manquement à l’obligation de servir.
L’exécution incorrecte des fonctions est fautive si elle ne résulte pas d’une insuffisance professionnelle ou si elle n’est pas due à des troubles pathologiques. 

 

Le manquement au devoir d'obéissance hiérarchique

L’agent doit se conformer, non seulement aux ordres, mais également aux mesures prises pour l’organisation du service, y compris s’il s’agit d’une décision qui affecte sa situation juridique (par exemple, un changement d’affectation non souhaité par l’agent).
Il n’est pas nécessaire que l’ordre soit écrit pour être obéi (un ordre oral aura la même valeur juridique).
L’ordre peut être donné par le supérieur hiérarchique direct de l’agent ou bien émaner d’un niveau hiérarchique supérieur.
Lorsque le fonctionnaire s’est conformé aux ordres de son supérieur hiérarchique, il se trouve en général dégagé de sa responsabilité.
Le juge administratif apprécie la responsabilité de l’agent qui exécute un ordre en tenant compte de son rang dans la hiérarchie et de ses fonctions.

La loi impose à l’agent de désobéir à un ordre uniquement si cet ordre est manifestement illégal ET de nature à compromettre gravement un intérêt public. Lorsque ces deux conditions cumulatives sont remplies, le devoir d’obéissance hiérarchique se transforme en devoir de désobéissance. L'agent ne sera plus sanctionné parce qu’il n’a pas obéi, mais parce qu’il n’a pas désobéi...

Cette obligation d’obéissance hiérarchique s’applique aux agents non titulaires.

 

Deux cas particuliers :
- L'abus d’autorité en matière sexuelle : la loi reconnaît aux subordonnés le droit de ne pas céder aux « agissements de harcèlement auxquels se livrerait leur supérieur hiérarchique, dont les ordres, menaces, contraintes, pressions auraient pour but d’obtenir (à son profit ou au profit d’un tiers, des faveurs de nature sexuelle ».
- Le droit de retrait : la loi reconnaît à l'agent le droit de se retirer (et donc de désobéir) d’une situation dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé.

 

Le manquement à l'obligation de neutralité ou de laïcité

Dans l’accomplissement de leurs tâches, les agents publics doivent respecter le devoir de stricte neutralité qui s’impose à tout agent collaborant à un service public.
Le manquement à cette obligation de neutralité peut résulter, par exemple, de l’agent qui opère une discrimination à l’encontre d’un usager en raison de l’ethnie, la religion, l’état de santé, etc... de la personne concernée.

Le manquement à l’obligation de neutralité peut résulter du comportement d’un agent qui manifeste volontairement ses croyances religieuses dans l’exercice de ses fonctions.
La manifestation (sous quelque forme que ce soit) d'une croyance pendant l'exercice des fonctions constitue une faute disciplinaire qui peut faire l'objet d'une sanction. Par ailleurs, les agents publics sont tenus à une obligation de réserve qui prolonge les obligations du service dans le but de protéger la neutralité du service public. Ainsi, ils ne peuvent pas démarcher leurs collègues ou les usagers du service public, même en dehors des heures de service, en alléguant de leur appartenance au service public, pour les faire participer à des activités privées de type religieux, confessionnel. Ils ne peuvent pas utiliser les moyens du service pour une activité strictement privée et en particulier une activité associative ou cultuelle. Ils ne peuvent pas faire apparaître leur qualité d'agent public et leurs coordonnées professionnelles sur des documents ou des sites de ces associations.

 

Le manquement à l’obligation de secret professionnel et discrétion professionnelle

Les fonctionnaires sont tenus au secret professionnel dans le cadre des règles instituées dans le code pénal. Le secret professionnel est destiné à protéger les secrets des particuliers. Il « s’impose à toute personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d’une fonction ou d’une mission temporaire.

Les fonctionnaires doivent faire preuve de discrétion professionnelle pour tous les faits, informations ou documents dont ils ont connaissance dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions. En dehors des cas expressément prévus par la réglementation en vigueur, notamment en matière de liberté d'accès aux documents administratifs, les fonctionnaires ne peuvent être déliés de cette obligation de discrétion professionnelle que par décision expresse de l'autorité dont ils dépendent ». 

Cette obligation est instituée dans l’intérêt du service pour protéger les secrets de l’administration dont la divulgation pourrait nuire à l’accomplissement normal de ses missions.

La violation du secret professionnel expose l’agent à des poursuites pénales et à des sanctions disciplinaires.

Les obligations de discrétion professionnelle et de secret professionnel sont étendues aux agents non titulaires.

 

 Le manquement à l’obligation d’informer le public

Les fonctionnaires ont le devoir de satisfaire aux demandes d'information du public dans le respect des règles mentionnées à l'article 26 et 27 de la loi n°83-634 du 13/07/1983.

Les limites à cette obligation tiennent à la nature du document dont la communication est demandée et à la légitimité des demandes d’information des administrés résultant de la législation sur la liberté d’accès aux documents administratifs. L’administration n’est pas tenue de donner suite aux demandes abusives.

 

Le manquement à l’obligation de réserve

L’obligation de réserve est l’obligation faite aux agents publics d’user de mesure et de retenue à l’occasion de l’expression publique de leurs opinions de manière à ce que l’extériorisation de ces opinions, notamment politiques, soit conforme aux intérêts du service public et à la dignité des fonctions occupées. Ainsi, le devoir de réserve interdit toute manifestation d’opinions ou de soutien qui ferait douter de la capacité de l’agent à respecter le principe de neutralité du service public.

Cette obligation ne connaît aucune dérogation, mais doit être conciliée avec la liberté d'opinion reconnues aux fonctionnaires à l'article 6 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983.

L'appréciation du comportement d'un agent au regard de l’obligation de réserve varie selon plusieurs critères dégagés par la jurisprudence du Conseil d'État. Parmi ces critères figurent la nature des fonctions exercées par l'agent et son rang dans la hiérarchie (le devoir de réserve s'impose ainsi de manière plus rigoureuse aux fonctionnaires qui sont investis d'une mission d'autorité et de direction), ainsi que le contexte dans lequel l'agent s'est exprimé, notamment la publicité des propos.

Dans le cas particulier du web log ou blog, qui peut être défini comme un journal personnel sur internet, la publicité des propos ne fait aucun doute. Tout dépend alors du contenu du blog. Dans ses écrits, le fonctionnaire auteur doit observer, en effet, un comportement empreint de dignité, ce qui, a priori, n'est pas incompatible avec le respect de sa liberté d'expression. En tout état de cause, il appartient à l'autorité hiérarchique, dont dépend l'agent, d'apprécier si un manquement à l'obligation de réserve a été commis et, le cas échéant, d'engager une procédure disciplinaire.

 Les limites de l’obligation de réserve sont les circonstances de la manifestation des opinions (un fonctionnaire ne peut être révoqué au motif qu'il a tenu des propos supposés injurieux à l'égard du maire lors d'une conversation téléphonique privée) et ne concernent pas les agents représentants d’un syndicat, qui doivent nécessairement s’exprimer avec plus de liberté afin de pouvoir exercer leur mandat. Mais le délégué syndical qui s’exprime en dehors de tout mandat de son organisation syndicale est soumis à l’obligation de discrétion professionnelle et devoir de réserve.

 

 Le manquement à l’obligation de désintéressement

L’obligation de désintéressement est l’interdiction pour un fonctionnaire de prendre ou de conserver des actions, parts ou tout autre droit rémunérateur dans une entreprise que son administration contrôle ou qui a des relations avec elle.
La violation de cette obligation est en général constitutive du délit de prise illégale d’intérêt passible de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende.

 

 Le manquement à l’honneur et à la probité

Le manquement à l’honneur est souvent lié au manquement à la probité.

La probité est l’observation rigoureuse des principes de la justice et de la morale. Elle s’impose à tout agent public et son manquement constitue une faute disciplinaire qui peut aussi être sanctionnée pénalement.
Constituent un manquement à la probité, le vol, le détournement de fonds, la corruption, la concussion, le trafic d’influence, la prise illégale d’intérêt, etc...

L’agent qui se rend coupable de tels manquements pourra se voir également reprocher un manquement à l’honneur professionnel.